La manifestation du 17/03/16, par Von Strauss, envoyé spécial du SlipSaleBlog :
- slipsaleblog
- 18 mars 2016
- 4 min de lecture
Ça en jette, envoyé spécial, hein ? Je me suis autoproclamé reporter, puisque mes camarades ont déserté les défilés du jour. J'ai donc profité seul des abondants rayons de soleil parisiens.
Enfin, quand je dis « seul », faudrait voir à pas rigoler, c'est pas tout à fait vrai.
Déjà, y avait un paquet de travailleurs syndicalistes, ce qui est normal me direz-vous, mais pas tant que ça quand c'est des lycéens et étudiants qui sont les initiateurs du bordel. Là, on peut profiter de toutes les générations, et il arrive même que les gens se mélangent. Parmi les travailleurs, on a pu apercevoir des binettes familières, comme le Goodyear Mickaël Wamen, ou encore le Continental Xavier Mathieu. Ces gars-là ont toute ma sympathie, mais j'ai pas osé leur dire.
Je me balade dans le cortège, je vais de la tête à la queue et inversement. Je voudrais pas être mauvaise langue, mais, si j'ai vu pas mal de drapeaux de syndicats et partis, pas de trace du FN, qui se la joue proche du peuple, d'habitude. Ni la CFDT, qui essaye encore de nous faire croire qu'elle est un syndicat indépendant et contestataire. Un syndicat, quoi. Pourtant, sur son site, ils disent qu'ils n'ont pas approuvé le texte.
Entre République et Bastille, mêlé aux lycéens, j'ai pu goûter un petit pet de quelques grenades lacrymogènes, j'ai même pas vu les policiers qui les ont balancées, puisque j'étais pas au premier plan, donc j'ai seulement un peu toussé.
J'ai croisé un type avec qui j'avais bossé quelques années plus tôt, on a discuté, puis j'ai continué ma route.
Bastille, un vieux qui regarde passer les plus jeunes manifestants : « Y a plein de pavés par terre, ils ont pas connu mai 68, ça se voit... ALLEZ LES JEUNES, FAUT Y ALLER, MAINTENANT, FAUT BALANCER ! »
Les lycéens font les cons. C'est bien , ça remue un peu plus que l'insupportable « les jeunes dans la galère, les vieux dans la misère, on n'en veut pas, de cette société-là ». Les mômes, ils laissent le cortège avancer plus vite qu'eux, et, quand il y a un espace qu'ils jugent suffisant, ils courent et ils gueulent. C'est fendard, mais si t'es devant eux, cavale ! J'étais devant eux, alors j'ai fait. Je regarde à ma droite, et je vois que 3 mecs courent comme moi, sauf qu'ils ont du matériel pour prendre des images et du son. C'est les gars de la chaîne « Osons Causer ». Alors moi, j'obéis, j'ose leur causer : « bravo les mecs, vos vidéos sont vraiment bien ! ». Leur réponse « merci poto » semblait vraiment sincère. Comme aux 50 mecs qui viennent les voir pour leur dire la même chose. Je fais un bout de chemin avec eux, ils interrogent des manifestants, et puis y a Caroline De Haas qui arrive (celle qui est à l'origine de la pétition pour le retrait de cette loi), pour leur montrer qu'elle est là. Je trouve qu'elle parle et se comporte vraiment comme une communicante, ça m'agace, alors je continue mon escapade un peu plus loin.
Pont d'Austerlitz, puis Boulevard de l'Hôpital. Un gros type regarde haineusement les manifestants, avachi sur son banc. Il ressemble à Nénette, la vénérable Orang-outan du Jardin des Plantes qui est situé à quelques mètres de lui, sauf qu'on aime bien la voir, elle.
Je remonte le défilé plus vite que la moyenne. Je me retrouve au derche d'une camionnette CGT. Une baudruche de 3 mètres se balance mollement sur le toit, tandis que les enceintes crachent des machins à l'ancienne, des chansons qui parlent de lendemains qui chantent justement, sur fond de cuivres puissants jouant des belles gammes majeures, avec des tambours. C'est vachement militaire, dans l'esprit, je me dis.
Puis ça passe à « Motivés » de Zebda.
Je me tire.
Les « étudiants-chercheurs-danseurs (sont) mobilisés », dit une pancarte. Chouette !
Je retrouve le collègue du début de cortège, j'avais pas remarqué qu'il était seul (ou alors ses potes l'ont abandonné). On bavarde encore un peu, puis nous voici sur la Place d'Italie. S'il y en a des qui connaissent pas, la Place d'Italie, tout comme celle de La Bastille, c'est un énorme rond-point où la circulation est plutôt dense habituellement.
Des gendarmes mobiles ont garé leurs fourgons à toutes les sorties du grand sens giratoire. Avec mon collègue, on aimerait bien trouver une épicerie pour s'en jeter une derrière la cravate, mais ça semble compliqué de passer. Il se souvient que la CGT bicrave des cannettes pour 1€ au cul d'une fourgonnette, c'est tout à fait dans nos tarifs. On se calle au soleil, sirotant les bibines et parlant de choses diverses, parce que nous sommes normaux, et c'est ce que font les gens normaux.
Des lycéens (2 selon la police, 73 selon les manifestants) n'entendent pas en rester là, alors qu'on est bien. Ils se dirigent vers le cordon qui bloque l'Avenue d'Italie en scandant un truc du genre « CRS OU PAS, ON VA À TOLBIAC !». L'intérêt de cette idée est moyen, Tolbiac sera à l'ombre, et il ne s'agit que d'un carrefour. Ils le font certainement pour provoquer un tantinet les "forces de l'ordre". Ces derniers déplacent un ou deux camions pour rendre le passage plus difficile. Les lycéens n'insistent pas, ils se tassent à plusieurs devant le barrage, mais il ne se passe rien.
Le gars qui m'accompagne rigole peu de temps après : « ce qui est marrant avec les manifs des lycéens, c'est que ça finit tôt, ils sont pressés d'arriver chez eux pour la soupe ! »
En effet, la place s'éclaircit, il est 17h.
Les bières sont finies, on décide d'en faire autant.
Von Strauss, pour le SlipSaleBlog.
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